Détail
Les cours d’eau des zones agricoles profitent également du castor
9 février 2021 |
Disparus au début du 19e siècle, les castors sont aujourd’hui présents presque partout dans le pays. En particulier sur le Plateau et au cours des dix dernières années, ils se sont tellement répandus que le nombre de castors vivant actuellement dans les eaux suisses est estimé entre cinq à six mille.
De vrais maîtres bâtisseurs
Les rongeurs sont connus pour modifier fortement la morphologie, mais aussi l’hydrologie et l’écologie des cours d’eau naturels et de les rendre ainsi plus dynamiques et plus riches en espèces. Jusqu’ici on ignorait cependant si cela s’appliquait également dans des proportions identiques aux cours d’eau urbains ou agricoles - précisément les cours d’eau que les castors colonisent principalement aujourd’hui. Désormais, les chercheurs de l’Eawag et de l’Université de Lausanne ont pu démontrer que c’est le cas : Les étangs de castors n’ont pas seulement augmenté la biodiversité de deux ruisseaux à vocation agricole, mais ils ont aussi modifié les ressources alimentaires des animaux aquatiques. Néanmoins, l’impact de l’activité du castor était fortement tributaire de la topographie des lieux.
Dans la commune de Marthalen, le castor a créé avec ses barrages une zone marécageuse sur les bords du Mederbach.
(Photo : Christopher Robinson)
L’impact dépend fortement de la topographie
Pour leur étude, les chercheurs se sont penchés sur deux ruisseaux du Weinland zurichois où des castors ont commencé il y a plus de dix ans à construire plusieurs barrages : le Mederbach dans la commune de Marthalen et le Langwisenbach dans celle de Flaach. Comme les résultats le montrent, l’activité des castors a un impact positif sur les ruisseaux. Ainsi, les étangs ont retenu des sédiments et des nutriments. En revanche, dans un ruisseau non endigué, ils ont été directement emportés. Du fait de la présence des étangs, les organismes aquatiques disposaient d’une plus grande abondance de sources de nourriture terrestre. Enfin et surtout, de nouveaux biotopes ont vu le jour. Ils ont offert un refuge à des animaux que l’on ne trouve pas normalement dans des eaux rapides, mais dans des eaux calmes. Cela a augmenté la biodiversité aquatique de tout le système. Alors même que tous ces effets ont pu être observés dans les deux ruisseaux, ils étaient plus prononcés au bord du Mederbach que du Langwisenbach. Ce phénomène peut s’expliquer par la différence de topographie : Le Mederbach a une pente plus faible que le Langwisenbach et n’est pas non plus limité latéralement par une sorte de gorge. Le cours d’eau a donc pour ainsi dire plus d’espace pour modifier son cours. Dans l’ensemble, les étangs à castors étaient aussi beaucoup plus larges et moins profonds en bordure du Mederbach.
La mesure dans laquelle le castor peut modifier son habitat dépend de la topographie du ruisseau. Sur les berges du Langwisenbach, la progression des étangs à castors était limitée des deux côtés par le remblai.
(Photo : Christopher Robinson)
Des résultats visibles rapidement
« Nos résultats montrent que les castors peuvent également revaloriser écologiquement les cours d’eau affectés par l’agriculture », déclare l’écologue aquatique et premier auteur de l’étude, Christopher Robinson. Le castor qui contribue à la revitalisation est une solution simple et durable qui est aussi déjà suivie en Suisse. En outre, bon nombre des effets positifs sont déjà visibles dès la première année, comme par exemple la colonisation de nouveaux habitats. Dans les ruisseaux étudiés à Marthalen et Flaach, on a même trouvé des espèces menacées comme des larves de libellules. Du point de vue du scientifique, le retour des castors est dès lors une situation win-win. « Mais si les populations continuent à se développer avec autant de succès, il y aura aussi inévitablement des conflits », fait observer M. Robinson.
Le castor rend les cours d’eau plus dynamiques et plus riches en espèces.
(Photo : Mark Giuliucci, Flickr, CC BY-NC 2.0)
Photo de couverture: Mark Giuliucci, Flickr, CC BY-NC 2.0