Catalina Chaparro

Pourquoi encouragerais-tu les filles et les jeunes femmes à travailler dans la science?

La science est un effort collectif qui nécessite le travail collaboratif de nombreuses personnes. Les équipes scientifiques composées à la fois d’hommes et de femmes génèrent des idées plus innovantes et plus percutantes que des équipes exclusivement masculines ou féminines (https://doi.org/10.1073/pnas.220084111). Nous avons donc besoin à la fois d’hommes et de femmes dans la science. Pourtant la plupart des domaines des STEM (science, technologie, ingénierie et mathématiques) sont dominés par les hommes, d’autant plus lorsque l’on monte dans la hiérarchie. Si nous voulons générer davantage d’idées scientifiques innovantes et percutantes, nous avons besoin de plus de femmes dans les STEM.

Qu’aimes-tu particulièrement dans ton travail?

Mon travail de scientifique est essentiellement théorique et conceptuel. Je peux passer des heures et des heures sur des questions écologiques et évolutives complexes que je traite généralement à l’aide des mathématiques. Et lorsque je trouve une solution, ce que j’éprouve se rapproche très fortement du sentiment de gratification que je ressentais enfant en résolvant un puzzle ou une énigme. Outre ma passion pour la résolution d’énigmes écologiques et évolutives, la grande flexibilité que m’offre mon travail est un autre aspect auquel j’attache depuis peu de la valeur. Travailler dans la science, en particulier avec des questions théoriques, me permet d’organiser mon temps, et c’est particulièrement précieux pour moi en tant que mère d’un jeune enfant et enceinte d’un deuxième.

Qui t’a inspirée à poursuivre une carrière scientifique?

Personne en particulier ne m’a inspirée. J’ai grandi dans un environnement social très peu marqué par les préjugés à l’encontre des femmes travaillant dans la science ou d’autres domaines des STEM. Je pense que ce contexte et ma passion précoce pour la science ont été des éléments déterminants dans ma décision de poursuivre un bachelor en science. Par la suite, lors de mes études de premier et de second cycle, de nombreuses femmes, qu’il s’agisse de mentores, de professeures, de superviseuses, etc., m’ont servi d’exemples. Donc personne ne m’a jamais découragée en me disant que je n’étais pas faite pour cette carrière. Selon moi, ces circonstances ont joué un rôle plus important dans ma décision de poursuivre dans la science que n’en a joué une quelconque figure d’exemple.

Quels conseils donnerais-tu aux filles et aux jeunes femmes?

Dans mon parcours, j’ai acquis la conviction qu’il n’y avait aucun «rôle naturel» des femmes. Par le passé, la société a essayé de contrôler et de limiter les espaces où pouvaient participer les femmes en imposant l’idée qu’un tel «rôle naturel» existait. La science est clairement l’un de ces espaces, resté pendant longtemps réservé aux hommes. Bien qu’elles soient affaiblies, des franges de la société continuent malheureusement de penser ainsi, et j’ai dû entendre des commentaires répugnants à cet égard, même au travail. Par exemple, depuis que je suis jeune maman, j’ai entendu des opinions du type «les femmes avec enfants devraient rester à la maison pour s’en occuper». Je suis en total désaccord avec de telles affirmations. Je pense que les PARENTS, pas seulement les mères, ont besoin de flexibilité pour équilibrer leurs obligations familiales et professionnelles. Mais après la grossesse et l’allaitement, il n’y a aucune obligation familiale qui relève «naturellement» des femmes. Il s’agit juste d’un exemple pour montrer que le «rôle naturel» des femmes est un mythe. Je suis convaincue qu’il n’existe aucun espace dans notre société qui soit plus ou moins «naturel» pour les femmes. Mon conseil aux filles et aux jeunes femmes serait donc de suivre leur passion et de s’épanouir en le faisant, que cet espace soit majoritairement masculin ou non.