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Le changement climatique augmente les carences en sélénium
21 février 2017 |
Le sélénium est un oligo-élément essentiel que nous absorbons via l’alimentation, par exemple dans les céréales. La quantité de sélénium dans la nourriture dépend fortement de la concentration en sélénium dans le sol. Des études ont montré que la concentration en sélénium est plus faible lorsque le pH et la disponibilité en oxygène sont élevés, et lorsque le pourcentage d’argile et de carbone organique dans le sol sont faibles. En Europe, les sols pauvres en sélénium se trouvent principalement en Allemagne, au Danemark, en Ecosse, en Finlande et dans certains pays des Balkans. Nous le savons grâce à des enquêtes régionales limitées.
La répartition mondiale du sélénium, cependant, était jusqu’ici en grande partie inconnue. Grâce à l’évaluation de nombreuses séries de données collectées à d’autres fins (exploration de données, ou data-mining), l’Eawag et cinq autres instituts* ont enfin réussi à en reconstruire la distribution mondiale. Les chercheurs ont compilé les informations de 16 séries de données collectées entre 1994 et 2016 et analysé au total 33.241 échantillons de sol. Ils ont analysé les concentrations de sélénium dans les 30 premiers cm de couche de sol et 26 autres variables environnementales. On a constaté que ce sont principalement les interactions entre le climat et les sols qui jouent un rôle pour la distribution du sélénium dans les sols.
La plus grande influence sur la concentration de sélénium dans les sols provient des précipitations et de la relation entre les précipitations et l'évaporation (indice de sécheresse). Les sols sont délavés par les précipitations, ce qui provoque une perte de sélénium. Dans le même temps, les précipitations peuvent avoir un effet positif sur la teneur en sélénium. En effet, les sols humides ont par exemple une teneur en oxygène inférieure à celle des sols secs, entrainant une moindre solubilité et ainsi une moindre mobilité du sélénium. De fréquentes précipitations conduisent en outre à un pH bas dans les sols, ce qui permet au sélénium, chargé négativement, de mieux rester lié à des particules du sol. C’est dans les zones avec des précipitations faibles à modérées et une forte teneur en argile des sols qu’une teneur élevée en sélénium est la plus probable. Les sols secs et alcalins avec peu d’argile contiennent plutôt moins de sélénium.
Sur la base de ces connaissances, les chercheurs ont modélisé la concentration de sélénium moyenne des sols pour les périodes allant de 1980 à 1999 et 2080 à 2099. Dans certaines parties d’Australie, de Chine, d’Inde et d’Afrique, le changement climatique entrainera un accroissement du taux de sélénium. Mais globalement, le sélénium contenu dans les sols va diminuer, concluent les chercheurs : Par rapport à 1980-1999, 66 % des surfaces agricoles vont perdre d’ici la fin de ce siècle (2080-2099) en moyenne environ 9 % de leur sélénium. Ce sont principalement les terres arables en Europe et en Inde, en Chine, au sud de l’Amérique du Sud, en Afrique du Sud et au sud-ouest des États-Unis qui seront affectées (voir carte).
Ces pertes peuvent aussi être importantes pour notre santé. Car aujourd’hui déjà, on pense que jusqu’à un milliard de personnes sont touchées par un apport insuffisant en sélénium. Les auteurs voient leur étude comme une alerte précoce pour les organisations humanitaires et l’industrie agricole. Pour contrer le manque de sélénium, des engrais contenant du sélénium pourraient être utilisés. La Finlande le fait déjà depuis 1984. On pourrait de plus également utiliser du sélénium en tant qu’additif pour l’alimentation animale.
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Évolution en pourcentage des concentrations de sélénium dans les sols en raison du changement climatique.
Importance du sélénium pour la santé
Le sélénium (Se) est indispensable pour la santé humaine et absorbé via l’alimentation. En raison de son effet antioxydant, il capture les radicaux libres et joue donc un rôle important dans le système immunitaire. Il sert également de composant pour de nombreuses protéines. Aujourd’hui, jusqu’à un milliard de personnes sont probablement touchées par un apport insuffisant en sélénium. Cela peut par exemple se traduire par une maladie du myocarde. Mais trop de sélénium peut également être dangereux et entraîner des vomissements, des atteintes hépatiques ou des troubles du goût.
L’oligo-élément sélénium est extrait des sols par les plantes et entre ainsi dans la chaîne alimentaire.
Photo : Agroscope (Gabriela Brändle, Urs Zihlmann), LANAT (Andreas Chervet)
* | Eawag: Swiss Federal Institute of Aquatic Science and Technology ETH Zurich (Institute of Atmospheric and Climate Science and Institute of Biogeochemistry and Pollutant Dynamics) Potsdam Institute for Climate Impact Research Rothamsted Research University of Aberdeen |