Détail
Stations d’épuration: sur les traces du gaz hilarant, néfaste pour le climat
11 avril 2023 |
Le gaz hilarant est le troisième principal gaz à effet de serre après le dioxyde de carbone et le méthane. Actuellement, il s’agit aussi du premier destructeur de la couche d’ozone. Pendant longtemps, le rôle des stations d’épuration dans les émissions de gaz hilarant a été fortement sous-estimé. Des chercheuses et chercheurs de l’Eawag ont récemment pu montrer que près d’un cinquième des émissions de gaz hilarant en Suisse provient des stations d’épuration. Celui-ci peut être libéré lors de l’étape de traitement biologique, du traitement des eaux putrides ou encore de l’incinération des boues d’épuration.
Le traitement des eaux putrides améliore l’élimination de l’azote
Une équipe de spécialistes de l’Office des déchets, de l’eau, de l’énergie et de l’air (AWEL) du canton de Zurich, en collaboration avec Adriano Joss, responsable de groupe du département Technologie des procédés à l’Institut de recherche sur l’eau Eawag, a observé de plus près les émissions qu’entraîne le traitement des eaux putrides. Celui-ci, qui fait appel au procédé Anammox, a été introduit ces dernières années dans plusieurs stations d’épuration suisses pour optimiser l’élimination de l’azote dans les eaux usées et ainsi réduire la pollution des cours d’eau. Lors du procédé Anammox, l’ammonium est transformé avec le nitrite en azote élémentaire, qui est ensuite sans problème libéré dans l’air. Selon la station d’épuration, le processus a lieu dans un seul réacteur ou, dans sa version optimisée, dans deux réacteurs distincts.
Les prescriptions en matière d’élimination de l’azote étant appelées à être encore durcies dans les prochaines années, le nombre de stations d’épuration pratiquant le traitement des eaux putrides va augmenter. Les spécialistes souhaitaient donc savoir plus précisément si ce procédé dégageait des quantités significatives de gaz hilarant et si des différences étaient observables entre le procédé à une étape et celui à deux étapes. L’équipe a donc prélevé des échantillons d’effluents gazeux dégagés lors du traitement des eaux putrides dans douze stations d’épuration suisses. Dans deux de ces centrales, elle a également procédé à des mesures de longue durée.
Les concentrations de gaz hilarant suggèrent un besoin de traitement des effluents gazeux
Les résultats publiés récemment dans la revue scientifique Aqua & Gas indiquent que les émissions de gaz hilarant provenant du traitement des eaux putrides varient fortement au cours du temps. Un nombre suffisamment élevé de mesures et d’échantillons prélevés sur une période plus longue est donc nécessaire pour émettre une opinion précise. Dans les stations analysées dans le cadre de l’étude, les concentrations d’émissions étaient semblables, que le procédé comporte une étape ou deux: entre 1.8 et 3.4% de l’azote contenu dans les eaux putrides est émis sous forme de gaz hilarant. Le traitement des eaux putrides contribue ainsi à près de 8% des émissions totales de gaz à effet de serre d’une station d’épuration. Du point de vue des spécialistes, ces valeurs suggèrent le besoin d’un traitement des effluents gazeux pour en retirer le gaz hilarant.
Adriano Joss et l’entreprise Infraconcept ont mené une autre étude pour déterminer la technique qui conviendrait le mieux au traitement des effluents gazeux. Celle-ci a clairement montré que leur incinération serait la solution la mieux adaptée, soit par oxydation thermique régénérative, soit par incinération dans une station d’incinération des déchets ou des boues d’épuration.
La hotte noire de mesure permet de prélever un échantillon des effluents gazeux émis lors du traitement des eaux putrides à la STEP du lac de Thoune afin de déterminer le niveau d’émission de gaz hilarant. (Photo: Christoph Dieziger, AWEL)
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