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Économiser l’eau, mais pas à n’importe quel prix
15 octobre 2018 |
Le concept « eau virtuelle » désigne l’eau nécessaire à la fabrication d’un produit. La quantité varie selon le site de production : Dans les zones de climat tempéré, la production d’un kilo de blé engloutit beaucoup moins d’eau que dans les régions désertiques. Lorsque des pays pouvant produire avec une empreinte eau optimale exportent des denrées alimentaires, cela économise de l’eau au niveau mondial. Des études montrent que désormais, le commerce mondial peut ainsi effectivement économiser de l’eau dans la production alimentaire. Toutefois : « Économiser de l’eau au niveau mondial ne suffit pas à désamorcer la pénurie d’eau », explique Hong Yang, chercheuse à l’Eawag. Dans une étude récemment publiée, elle a identifié avec ses collègues trois points noirs qui assombrissent le bilan
- La pénurie d’eau régionale s’aggrave
Lorsqu’un pays souffrant de pénurie d’eau exporte beaucoup, le problème de l’eau s’aggrave localement - même s’il produit de manière efficiente. Ce dilemme touche par exemple l’Australie. Ce pays vend de nombreuses denrées alimentaires en Thaïlande où la production serait encore plus gourmande en eau. Mais en raison des exportations importantes, l’Australie s’aridifie elle-même dans certaines régions. - Économie d’eau, mais pas au bon endroit
La sécheresse ne sévit pas dans toutes les régions. À titre d’exemple, la Suisse importe mille tonnes de soja du Brésil. Certes, ce pays d’Amérique du Sud produit effectivement de manière plus économe en eau comparativement à la Suisse. Mais du fait que la Suisse possède suffisamment d’eau, le commerce entre ces deux pays ne désamorce pas la pénurie mondiale d’eau. - Les engrais et les pesticides remplacent l’eau
Certains pays ont pu réduire fortement leur consommation d’eau pour la production de denrées alimentaires. Mais c’est aussi en pulvérisant des engrais et des pesticides dans leurs champs. Ce qui a un impact négatif sur les eaux et l’environnement. Citons par exemple les États-Unis qui font preuve d’une haute efficience en matière de consommation d’eau, mais qui par contre utilisent d’autant plus de produits phytosanitaires dans l’agriculture.
Un projet du groupe de recherche de Hong Yang étudie maintenant l’impact du commerce de denrées alimentaires, et donc d’eau virtuelle, sur l’état de santé des eaux. Yang souligne que la Suisse est extrêmement concernée par ce problème dans la mesure où les agriculteurs suisses pulvérisent généralement beaucoup d’engrais et de pesticides pour un rendement alimentaire comparativement faible.