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Les purges sédimentaires fréquentes menacent la biodiversité des insectes dans les cours d'eau alpins
28 février 2019 |
Barrages, seuils, prises d'eau : les cours d'eau alpins sont fortement impactés par des installations de production hydroélectrique qui modifient à la fois le régime d'écoulement et le transfert de sédiments, ce qui a de fortes conséquences sur la faune et la flore en aval. Afin de limiter les impacts écologiques, il importe de garantir des débits résiduels suffisants et de rétablir une dynamique naturelle du transport de sédiments. Une nouvelle étude de l'Eawag et de l'université de Lausanne montre maintenant que, dans le cas des prises d'eau, les sédiments doivent faire l'objet d'une régulation particulière pour que les organismes aquatiques puissent survivre.
En effet, des quantités importantes de sables et de graviers s'accumulent dans les petits bassins de rétention liés aux prises d'eau. Dans les bassins versants présentant un fort taux d'englacement, ces quantités sont telles que des purges doivent être effectuées jusqu'à 17 fois par jour afin de vider les trappes à sédiments. Les conséquences sont dramatiques : en été – période de fréquence maximale des purges –, les scientifiques n'ont quasiment détecté aucun signe de vie dans la Borgne d'Arolla, un cours d'eau alpin dans la Valais. En effet, les petits organismes se trouvent ensevelis sous les apports répétés de sédiments fins et grossiers et la situation ne s'améliore qu'à l'automne, lorsque les purges s'espacent. « À notre grande surprise, le cours d'eau est alors rapidement recolonisé à partir des affluents », confie l'écologue Christopher Robinson, de l'Eawag. Toutefois, les communautés restent appauvries. Et, dès que les purges reprennent, les animaux disparaissent aussi vite qu'ils sont venus.
Davantage de sédiments, davantage de purges
Il y a ne serait-ce que 25 ans, la situation était tout autre : à l'époque, une équipe de biologistes avait déjà étudié les macroinvertébrés de la Borgne d'Arolla, comme les vers ou les larves d'insectes. Alors que les prises d'eau existaient déjà, l'impact écologique constaté était relativement faible. Mais, suite à la fonte des glaciers dans le bassin versant, les apports de sables et graviers dans le cours d'eau ont augmenté, exigeant un nombre croissant de purges quotidiennes. Jusqu'à atteinte du niveau actuel qui interdit quasiment toute vie en aval. « La situation pourrait même s'aggraver dans les temps qui viennent », estime Robinson. Du moins jusqu'à ce que les glaciers aient complètement disparu. « Pour que les organismes aquatiques puissent survivre toute l'année en aval des prises d'eau, il faut impérativement que la fréquence des purges sédimentaires soit revue à la baisse », ajoute l'écologue. Il est alors important d'imposer un régime de débits résiduels convenables et de le coupler à un régime sédimentaire adapté. Seule cette option permettrait en effet d'évacuer les sédiments accumulés au niveau des prises d'eau de façon naturelle et de les répartir dans le lit du cours d'eau - et donc d'y maintenir un écosystème viable.
Une prise d’eaux dans la Borgne d'Arolla
(Photo : Chrystelle Gabbud)