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Les objectifs de développement durable s’appliquent aussi à la Suisse
14 septembre 2023 |
L’Agenda 2030 pour le développement durable, approuvé par l’ONU en 2015, s’applique aussi à la Suisse. En 2023, nous sommes à mi-parcours pour la réalisation des 17 objectifs qui y sont formulés. Plusieurs d’entre eux concernent l’eau en tant que ressource et biotope. L’institut de recherche sur l’eau Eawag a présenté aujourd’hui, jeudi 14 septembre, sur le site de Dübendorf, près de 150 spécialistes du conseil, de l’administration, de la politique et de la recherche les actions restant à mener dans ces domaines pour atteindre les objectifs fixés d’ici 2030.
«La paix est une condition essentielle pour le développement durable.»
Daniel Dubas, délégué du Conseil fédéral pour l’Agenda 2030
La Suisse, pays en voie de développement
Daniel Dubas, délégué du Conseil fédéral pour l’Agenda 2030, a expliqué au début du colloque pourquoi l’accent mis autrefois sur les «pays en voie de développement» est une notion aujourd’hui dépassée. Il estime qu’avec sa forte consommation, notamment en énergie et en ressources, ainsi qu’une empreinte carbone et eau proportionnellement très élevée, la Suisse peut, elle aussi, être qualifiée de «pays en voie de développement». L’ampleur de la perte de biodiversité en Suisse est inquiétante selon lui. Il faut surmonter les conflits d’objectifs, par exemple entre l’utilisation de pesticides et d’engrais dans l’agriculture et la protection de l’environnement explique Daniel Dubas. Il demande un renforcement du dialogue entre les parties prenantes de la recherche, de la politique, de l’administration, de l’économie et de la société. «La voie est juste, le tempo ne l’est pas», tel est le bilan tiré par l’expert à propos du cours des réalisations à l’horizon 2030. Il cite la guerre en Ukraine comme l’un des principaux obstacles: la paix, selon lui, est une condition préalable au développement durable.
Réduire les débordements d'eau sale dans les cours d'eau
Lauren Cook, ingénieure en environnement de l’Eawag, a présenté les premiers résultats des études sur l’infrastructure bleue-verte, c’est-à-dire les plantations d’arbres, la création de nouveaux prés et étangs ainsi que d’autres mesures aptes à rafraîchir les villes ou à stocker l’eau de pluie. Les infrastructures bleues-vertes réduisent ainsi par exemple les débordements d’eau sale. En effet, lorsque des pluies intenses s’abattent sur des surfaces imperméabilisées, les canalisations ne peuvent pas évacuer toute l’eau. La pluie, mais aussi les eaux usées non traitées, déborde ensuite dans les ruisseaux et les rivières. Prenant l’exemple de la commune zurichoise de Fehraltorf, Lauren Cook a montré qu’en recouvrant d’une infrastructure bleue-verte 30 pour cent des surfaces de la zone industrielle et urbaine, on pouvait atteindre une réduction de 80 pour cent de ces débordements. «Simultanément, les villes bénéficient ainsi d’une meilleure qualité de vie et ces mesures favorisent aussi la biodiversité. Cela correspond à l’objectif de développement durable numéro onze», explique la chercheuse.
Après l’arsenic, prévoir à présent les hotspots du nitrate
Dans de nombreux pays du monde, comme le Pakistan, la Chine, l’Argentine ou le Mexique, les eaux souterraines sont polluées à l’arsenic en raison de la géologie régionale. Un groupe de chercheuses et chercheurs dirigé par le géochimiste Michael Berg et l’ingénieur en environnement Joel Podgorski de l’Eawag a établi des cartes des zones à risque à l’aide de modèles informatiques complexes. À de nombreux endroits en effet, les eaux souterraines sont pompées et consommées sans analyse de la concentration de ce polluant. Les spécialistes estiment que plus de 200 millions de personnes dans le monde consomment de l’eau polluée à l’arsenic, mettant ainsi leur santé en péril. Les chercheuses et chercheurs ont donc combiné leurs modèles avec les chiffres de densité de démographique, ce qui leur permet d’en déduire les lieux où des mesures sont à prendre d’urgence. Les cartes de risque sont en accès libre sur www.gapmaps.org avec le soutien de la Direction suisse du développement et de la coopération.
Actuellement, leurs expériences de localisation des zones à risque pour la pollution des eaux souterraines avec les données existantes sur le climat, la géologie, les sols et l’exploitation des sols sont également utilisées par les scientifiques en Suisse. Toutefois, l’accent n’y est pas mis sur l’arsenic, mais sur le nutriment qu’est le nitrate. «Grâce à 500 points de mesure, nous savons certes précisément où les taux de nitrate sont trop élevés dans les eaux souterraines, explique Joel Podgorski, mais il reste encore des angles morts.» La prévision des hotspots de nitrate doit maintenant aider à optimiser le réseau de mesures et à intensifier le dialogue avec l’agriculture dans les régions à risque. «Si la prévision des concentrations de nitrate fait ses preuves sur le Plateau suisse, d’autres pays où la surveillance des eaux souterraines est en cours de développement pourraient aussi profiter de notre recherche», espère le chercheur.
Détecter les germes fécaux avec l’incubateur artisanal
L’objectif de développement durable numéro six s’intitule «eau propre et assainissement pour tous». Néanmoins, trop de personnes dépendent encore d’une eau potable de qualité douteuse. Les germes fécaux comme les bactéries E. Coli provoquent des diarrhées et compromettent la qualité de vie et les possibilités d’éducation, en particulier dans les régions reculées. Les laboratoires pour tester la qualité de l’eau font défaut. C’est pourquoi les chercheuses et chercheurs du département Assainissement, eau & déchets pour le développement de l’Eawag ont élaboré des solutions adaptées à la vie quotidienne, fabriquées et exploitées localement. Lors de la journée d’infEau, l’experte en eau potable Sara Marks a notamment présenté un incubateur artisanal. Ce dernier permet de stocker les échantillons d’eau et de surveiller la croissance de micro-organismes dans des conditions contrôlées.
Photo de couoverture: Le thème de «l’eau» s’étire comme un fil bleu à travers les ODD, auxquels se réfère aussi la recherche à l’Eawag (Aquarell: communication Eawag/Philipp Ringli)